Deuxième épisode 

Dans le 1er épisode , nous avons rencontré Antoine et Anne<<-Charlotte appelée aussi Anne. Les vacances n'ont pas très bien commencé...

Antoine l’agaçait à s’agiter, à la vouloir tous les jours de leurs vacances. Elle aimait son mari du même amour. Mais tel un jeune homme, celui-ci avait-il pris quelques rides. Quant à leurs yeux, à eux, l’âge leur avait concédé en façade des lunettes. Et chacun sait que bien que, très peu, remboursées par la Sécurité Sociale, les montures ne sont pas pour autant transparentes. Surtout quand on s’appelle Antoine et qu’on a la meilleure mutuelle qui soit, et donc les montures les plus épaisses du monde ! Le pauvre !

Damnées soient sa mauvaise foi, son caractère d’huitre, et ses foutues lunettes en écailles façon Pierre Coffe ! D’abord celles du gueulard n’étaient pas en écailles mais en plastique de couleurs. D’accord, Antoine ne les portait que pour lire. Mais, à Saint Malo, avec son cire jaune Guy Cotten, ses bottes Aigles, son Figaro sur les genoux, assis sur un banc comme les vieux qui pullulent ici, le crâne rasé pour masquer sa calvitie juvénile et ses lunettes de tête d’empaffé, franchement ! Non, mais franchement qui aurait eu envie que son mari ressemble à un Minion ! Qui ?

Forcément, l’âge était là. La calvitie ne figurait pas sur la photo de mariage. Mais l’amour avait triomphé sur la disparition des tout au plus 4 cm d’épaisseur de cheveux jamais atteinte par Antoine. On s’attache trop au regard pour juger de la valeur des choses. La piste d’atterrissage pour les mouches qu’elle soit dégagée comme chez notre Minion à ses heures bretonne ou enfouie sous d’épais cheveux est le couvercle qui cache une belle beauté, croit-on.

Car Anne s’attachait à deux autres beautés de la personne, ce qui tempérait la portée du premier jugement, celui d’à première vue. Anne avait rencontré par le cercle des ses proches amies l’œuvre d’une dame à la spiritualité époustouflante dont la profondeur était paradoxalement la légèreté de se voir être. Cette dame s’appelait Marguerite Hoppenot. Son regard et sa parole étaient magnifiques, son œuvre l’est tout autant. Marguerite savait regarder le cœur du plus vil assassin avec la plus pure intention comme celui du meilleur des hommes, en faisant pauvreté de son égo et en accueillant les deux avec une égale et bienveillante attention. Rares sont ces grandeurs d’âmes

Antoine était pour elle son amour de jeunesse. Un mirage benêt apparu dans le noir du pourquoi pas, lors d’une soirée étudiante. Leur rencontre était fortuite, et n’aurait jamais dû se produire sans la ruade d’un corps à la dérive. Un soir de grande cuite joyeuse et imbécile, signe d’émancipation, quand bébé mon grand chéri d’un mètre quatre-vingt-dix embarrasse maman de le savoir livré aux méchants. Une très bonne et belle âme pourtant, au sourire d’ordinaire charmant et ce soir hébété par le nombre de bières avalées plus que bues. L’esprit de ce grand matheux avait longuement divagué entre vapeur et éthers puis finalement s’était resigné à conclure. Si dégueuler était acté, encore fallait-il résoudre les problèmes d’où, quand et comment. ? Moman claquant des dents au lit, lui téléphoner était le pire des raisonnements par l’absurde. Il fallait à Antoine découvrir que les équations les plus complexes font l’ingénieur brillant mais ne résolvent jamais les aléas de la vie. Se remémorant cela, Anne sourit. Il lui revint à l’esprit qu’elle n’était pas mieux. Papa et maman des filles se trompent parfois de coupables lorsqu’au soir de la fin de semaine, ils finissent par retrouver leur tourterelle en bonne compagnie d’un grand benêt qu’ils auront hélas un jour pour gendre ou peut-être pas. Leurs parents respectifs firent d’ailleurs connaissance en les cherchant aux mêmes endroits. C’était juste avant les vacances de la Toussaint. C’était leur première année de prépa. Finalement, c’est la police qui leur demanda de passer au commissariat chercher leur fierté devenue honte. L’alcool aime aussi les filles et elles le lui rendent bien. Sur chemin du retour, ce soir-là, les moteurs des deux voitures eurent bien du mal à s’entendre faire du bruit. Pour l’anecdote qu’Antoine aimait à raconter lorsqu’on leur demandait comment Anne et lui s’étaient rencontrés il tenait à rapporter qu’il y eut deux justes arrêts d’urgence quasi simultanément sur des routes pourtant différentes. Il fallait bien se débarrasser du vomi, avant de reprendre leur rôle d’enfants studieux et très sérieux.

Être excellente élève à l’école fait la fierté des parents, et lorsqu’après de longues et difficiles études, on obtient une très bonne situation, on a celle de son porte-monnaie. Allongée sur le grand lit, scrutant les stucs du plafond, Anne Charlotte était songeuse. A quoi bon trimer dans ses études juste parce qu’on a des facilités, pensait-elle, pour travailler toujours autant dans sa vie d’adulte, avoir des ennuis pas possibles ? « Et le pire du pire, un vrai con comme chef de service ! » Souvent Antoine reprochait à Anne Charlotte son langage grossier, Cette dernière se collait à sa poitrine, passait ses bras autour de son cou, et les yeux dans les yeux, lui rappelait qu’un certain Dante Alighieri, poète italien 13e siècle avait eu la bonne idée d’écrire sa Divine Comedie en italien et non en latin. Puis elle concluait par « 

 quoi Antoine répondait devant les yeux de leur filles ébahies 

 toute particulière de la non-intelligence. La personne intelligence a conscience que l’étendue de son ignorance dépasse très largement ses connaissances alors le con sait toujours tout sur tout. Ce qui est parfaitement le cas de son chef de service.

Un jour, Anne-C s’était fâchée toute rouge avec une autre cheffe de service, une pure et dure qui s’en était plainte à direction « Moman, la vilaine subordonnée m’a dit la vérité ! » juste parce que Anne lui avait expliqué qu’on pouvait raisonnablement appréhender la vérité selon le point de vue qu’on prenait pour la voir. Il y avait un dysfonctionnement dans la chaine hiérarchique et la cheffe vociférait sa colère contre elle. Une règle apprise à l’école impose au destinataire de la colère de baisser les yeux et de laisser le colérique se décharger de sa charge émotionnelle intense. Ça, c’était la théorie. Car Anne ne supportait pas ce diktat qui faisait la part trop belle à celui qui est incapable de se contrôler. Alors elle se lança dans des explications qu’elle allait regretter par la suite. Anne ne supportait pas la hiérarchie. Pour les faits concrets qui avaient cours dans ce cas précis. La subordonnée employait la métaphore du train. Le chef est la locomotive qui tire des wagons. Or elle se hasarda à laisser à sous- entendre que la locomotive devant elle était il y a encore peu un wagon comme tous dans le service. Jusque là tout allait bien. Ce fut quand elle se mit à supputer que l‘actuelle cheffe aurait, du moins l’ensemble des présents…

Anne se redressa en sursaut sur son lit !

La quadra de retour à sa réalité de vacancière à Saint Malo s’en voulut de ne pas parvenir à oublier à couper les ponts avec sa vie quotidienne. Sandra, sa meilleure amie, lui répétait souvent d’arrêter de se comporter avec ses pensées circulaires qui s’auto entretenaient et elle lui offrit un petit livre

 qui comparait leur entretien à celui d’un petit hamster dans sa cage. Elle l’avait lu. Ses bienfaits sur elle parlaient d’eux-mêmes.

Elle entreprit de se lever. Elle chercha en vain un réveil , une montre ou une horloge , enfin quelque chose qui lui donnerait l’heure .

 Ch … , gare à toi si tu fais devant chez moi

 On est foutu, on pense trop ! comment se libérer de Pensouillard le hamster 

Premier Conte 

premier épisode

Ça y est ! Les vacances étaient là. Le soleil présent, malgré le petit vent toujours vicieux en contrebas de la digue. Antoine prenait grand soin d’éplucher sa pêche, fruit des vacances. Ses doigts poisseux du jus de cette infame ressemblance importée d’Espagne en témoignaient, les quinze jours à venir allaient s’avérer juteux. Enfin, plus du tout à fait, car, utilisant toujours les extrémités de sa main droite, il venait tout juste d’en dénombrer neuf ! Neuf ? Posant son fruit sur son assiette, à l’écart du jus de viande sur le petit matelas de peau déjà ôtée Il s’y reprit.

Voyons : Lui et son épouse Anne et leurs deux filles étaient arrivés de Cachan la veille, donc samedi, en fin d’après-midi. Le proprio, le genre de type indiffèrent qui pense qu’être exagérément mièvre rend forcément sympathique, leur avait remis les clés, et expliqué le tout venant des choses à connaitre. Une fois le zig parti, ils avaient investi les lieux, lui déchargeant le coffre de sa BM en double file, les warning en justificatif ; la marinière Armor Lux comme pour dire aux locaux : Cool les frères, solidaires ! Je suis du pays !

Anne, elle, avait mis plus de temps. Il est vrai que la présence de ce poil ? Au fond de l’évier mais aussi de sa méfiance toute naturelle de femme, avait fait qu’elle avait réclamé à sa fille, elle, en miniature, d’aller promptement chercher le paquet de lingettes, dans la boite à gants de la voiture. « Tu vois ma fille, avait-elle fait remarquer à son ado plus soucieuse de ne pas énerver inutilement sa mère que de tenir compte de ses conseils avisés dont elle n’avait cure, il ne faut jamais s’acquitter de douter du ménage fait par un homme. Même si celui- ci est en couple, il aura procédé trop vite pour le considérer comme fait. Il convient donc toujours de repasser après. » Anne était vieille France et s’en réclamait. Elle avait aussi un problème avec les poils, forcément les hommes. Elle en avait un aussi avec Antoine, ce gourmand. Mais ses pensées ne concernaient pas son ainée, qu’elle jugeait déjà bien déjà dévergondée. Alors elle s’abstint et refit le ménage à fond, entamant largement la patience d’Antoine, qui, depuis des jours durant avait aspiré à un autre scenario, bien plus … romantique ! Il se voyait arpentant la digue, avec au bras son Anne Charlotte dont le diminutif était Anne, l’œil aux aguets, à la recherche de la lumière ou de tout facteur qui déclencherait chez elle le retour du désir charnel .

Dimanche, aujourd’hui donc : un. Il tendit son pouce. Lundi, deux. Mardi, trois, Vendredi, treize. Samedi quatorze.

Mais Samedi, c’était départ à 10 heures. Donc, ça ne comptait pas. Treize jours pour faire les folies interdites pendant l’année. En cachette, depuis avril, il avait suivi le calendrier des menstruations de sa femme. Tout s’était merveilleusement enchainé, Anne serait tranquille durant ces quatorze jours.

Antoine jaugea du regard sa pêche à présent épluchée. Quelle stratégie allait-il privilégier pour la manger ? Le fruit en entier, ou découpé en quartier ? Mais, en réalité, ses pensées étaient ailleurs. Emoustillées par une perspective. Sur le chemin de la chapelle Sainte Anne, son épouse n’avait-elle pas lâché ce fameux ?

« Le surmenage d’hier a fini de m’achever après tout ce ménage de la veille à Cachan et la préparation des vacances à emmener ! N’est-ce pas mon gros nounours, qu’un petit repos avant d’aller à la plage me ferait du bien ? Et à toi, aussi ? »

Sans doute parce qu’il l’avait sans doute trop pressée, il sentit soudain et sans qu’il n’ait pu rien entreprendre pour l’éviter, comme un poisson lui glisser entre les doigts, sa pêche s’en était allée faire un strike sur son unique verre à pied et répandre son bon restant de Meursault sur la nappe jusque-là encore blanche immaculée ;

« Putain Antoine, tu es un vrai porc ! Bordel, tu as vu la nappe ? Qui va la laver pendant ses vacances ? Non, mais franchement ! Crois-tu que je vais dire youpi, bravo l’artiste ?

Tu m’écœures Antoine. Tu ne fais pas gaffe à moi. Je suis crevée, entre mon boulot, mes soucis avec ce con de dirlo de Cédric, la maison, les courses, les filles, l’école, leurs activités, les devoirs, la lessive, le ménage, les factures, et les vacances à préparer. Et maintenant la nappe ! Je vais me coucher. Tu n’as qu’à débarrasser. Tu peux t’occuper aussi de la nappe, Mets tout de suite du gros sel et lave à l’eau froide »

Le gros nounours était dépité. Il pensa alors qu’il aurait dû poser sa pêche dans son assiette pour réfléchir. Comment un plan aussi facile, avait-il pu échouer si près du but à cause d’une maladresse ? Quelle tuile ! Il leva les yeux légèrement vers la bérézina et résolut à se lever pour entreprendre de nettoyer les dégâts puis de débarrasser la table. Il se rappela alors que ses deux filles avaient assisté à l’humiliation de leur père. Il croisa et sonda le regard de sa cadette dont il espérait l’entier soutien. Il n’obtint que ses yeux moqueurs, et ô surprise ! Un petit grognement goguenard de cochon, un petit reniflement sonore, une désapprobation totale. Ultime provocation qui le poussa à se priver de l’aide de ses ados. Il envoya la grande et le petit cochon aller voir ailleurs s’il y était. Et lui passa sa sieste à reconsidérer son monde intime et à débarrasser la table, et en somme à faire en vacances tout ce qui sortait de l’ordinaire, lui le manager si souvent absent, l’homme aux 3 filles qui faisaient à la maison ces corvées, ces fatigues sur ordinaires sans jamais les aider.

Il donna raison à l’adage, il faudrait repasser après lui. Puis Il prit son ciré jaune de parigot, enfila ses bottes de caoutchouc assorties, les locaux jaloux, ces culs terreux, ce n’était pas le moment ; qu’ils aillent se faire. Plus rien n’existait au monde que sa tristesse intense, ses larmes si épaisses qu’elles en étaient paresseuses à rester briller au chaud dans leur coin, et cette lame de rasoir serrée dans sa gorge, si douloureuse, ce mal être absolu d’un bonheur gâché.

La digue avait été posée et ancrée là, sur le sable, en défi aux éléments, par des hommes sans visage et nulle autre postérité que l’oubli total ; hères voués à la vie rude de poseurs de pierre, échines brisées par la courbe du temps et par l’avarice de ceux qui les avaient mis à l’ouvrage. Autres bonheurs, jadis, bien plus contrariés.

L’humain pleure sa peine futile et hurle au mauvais sort lorsque sa raison lui donne tort. Un mur pour espère barrer le ressac de la mer, le souffle du vent, et des pluies qui le mouillent ! Rien n’empêchera la colère des trois réunis, lorsque viendra le jour de se fâcher de l’arrogance endurante de l’intelligence. Autre peine jamais entrevue et pourtant !

Antoine s’acquitta de gravir le dénivelé et se retrouva sans prévenir, face à la perpendiculaire beauté, acérée de ses gris, jaunes et bleus sur fond de blanc, à la sauvagerie d’une lumière phare qui éblouit et prend l’âme par les tripes.

La marée était basse et l’estran mer de vent. La digue où qu’elle aille était, outre son ruban granit argenté, pleine à dégueuler de ses endimanchés, empaffés des godasses de ville et de leur gueule bien coiffée.

Le parigot déguisé en vacancier d’outre temps, après le choc de son heurt avec l’horizon sentit qu’il lui serait utile d’aller tout là-bas, se confier au confessionnal de l’ourlet mouvant et fin commencement de Neptune, là où la terre se termine.

Pendant tout ce temps, allant de la nappe au gros sel jusqu’à ce que son mari parvienne au ras de l’eau, Anne-charlotte avait dormi et dormait encore. Pour elle, ces vacances avaient la saveur de l’oisiveté à lire et lire encore, à évader son esprit dans l’ailleurs, à contempler les autres à s’affairer dans l’entrelacs de lignes d’écritures imaginées par d’autres qui en auraient le temps. Mais surtout elle était venue là pour se débarrasser de la pesante cape de la fatigue

Premier conte 

Conte de plage, c'est le plaisir que je vous offre de voir l'écriture d 'un recueil de nouvelles en direct.  C'est surtout pour vous l'occasion  de me questionner ,de me faire remarquer, d'infléchir mon écriture.  De l'influencer 