Annoncée en vidéo, voici notre analyse XXL de Laudate Deum, le nouveau texte de François sur l’écologie. Ou quand sainte Greta remplace la tradition chrétienne.
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Chose promise, chose due: annoncée sur notre chaîne YouTube la semaine dernière, voici une analyse sur plus de 15'000 signes de la dernière lettre écologiste du pape. Pour que notre travail puisse continuer, vos abonnements sont précieux.
« Une bête est retirée de son pré, mise en cage, puis sur un tapis roulant. C’est l’élevage en batterie, qui rapporte d’énormes bénéfices, et dont l’idée ne serait venue à aucune des grandes civilisations, bien que leurs étables aient souvent été des plus sordides. On y voit végéter, à des millions d’exemplaires, une espèce de Golem à qui l’on n’accorde plus que la mécanique de son être. On a économisé jusqu’au contour : crêt et ergot du poulet n’ont pas lieu d’être. Mais l’ivrogne qui bat son chien encourt un châtiment. [1]»
Si elles étaient sorties de la plume du pape actuel, ces lignes du génial Ernst Jünger auraient certainement déchaîné des tempêtes d’indignation du monde conservateur. À nouveau, le très politique pape François aurait été accusé d’être le Souverain non plus pontife, mais wokiste. Un leader religieux qui sortirait une nouvelle fois de son rôle et qui se soucierait, de façon totalement inappropriée, d’un sujet qui ne concernent pas l’Église. Telle n’est pas notre position.
Mais à l’inverse, difficile de ne pas nous montrer interpellés par certaines réactions consécutives à la mise en ligne d’une vidéo relevant les approximations et les ambiguïtés flagrantes de la nouvelle exhortation apostolique Laudate Deum du chef de l’Église catholique. « Monsieur je ne manquerai pas de faire de la pub à votre vidéo pour montrer un bel exemple de mauvaise foi, c'est tellement caricatural d'un bout à l'autre qu'on ne sait pas s'il faut rire ou pleurer », s’indigne par exemple un internaute sur YouTube. D’autres, plus surnaturels dans l’approche, nous confient qu’ils vont prier pour notre conversion à la foi catholique. Comme si l’idée même d’un regard dubitatif sur un document portant sur un domaine étranger au Credo devait aussitôt entraîner une excommunication. Devrait-on consentir à regarder l’édifice théologique s’effondrer sans avoir témoigné ?
Impitoyables par loyauté
Pour poser le cadre, rappelons d’abord que le site benoit-et-moi.fr, très critique à l’égard de François, affirmait le six octobre dernier que l’exhortation apostolique a été réalisée par un cercle très restreint de proches du pape. Et d’ajouter que « la Secrétairerie d’État du Vatican n’a(vait) reçu le texte pour commentaires que peu de temps avant qu’il ne soit finalisé, ce qui n’a laissé “même pas une journée” au bureau diplomatique pour peser sur le texte ou pour compiler les suggestions des diplomates nommés auprès du Saint-Siège. » Face à des méthodes en rupture avec les usages, doit-on s’interdire d’analyser un document sous prétexte qu’il partirait d’une bonne intention – freiner le saccage de l’environnement ? L’honnête homme répondra que non, à moins de se comporter en groupie de François. Nous sommes de ceux qui croient qu’une cause n’est jamais aussi bien défendue qu’avec une liberté totale, pour paraphraser Bernanos.
Un pape hors de son rôle, tonne le géographe Jean-Robert Pittet (livre en haut à droite).
Mais d’abord la question incontournable : pourquoi un journal conservateur devrait se pencher sur les affirmations du pape en matière d’écologie ? N’ont-elles pas autant de valeurs que ses prédications footballistiques ou que ses positions très tranchées en matière de lutte contre le Covid ?
A cette question, un livre important du géographe Jean-Robert Pitte [2], cité dans la vidéo à l’origine de cet article, répond de façon juste et nuancée. En page 327, l’auteur souligne : « L’Église est dans son rôle en recommandant d’agir sur l’environnement planétaire dans le respect des générations à venir, ce qu’il est convenu aujourd’hui de qualifier d’action durable. En revanche, le pape outrepasse ses missions en entrant dans des détails techniques qu’il ne maîtrise pas. » Des propos forts, mais rédigés à propos de l’encyclique Laudato Si, de 2015. Or cette dernière était encore loin du ton presque exclusivement politique de sa suite Laudate Deum.
Il ne s’agit donc pas de décortiquer ce document pour détruire mais pour avertir : quand une autorité religieuse se lance dans un hors-piste parascientifique, elle risque de perdre sa crédibilité à la fois politique, mais aussi spirituelle. C’est donc un devoir d’honnêteté intellectuelle, pour le chrétien, de mettre en garde contre la déconnexion croissante des attentes des fidèles et des marottes de leurs élites. Surtout quand ces dernières, incarnant deux fois le camp du Bien, pondent des documents mal ficelés en s’enfermant dans leur tour d’ivoire. Les signes du malaise actuel sont d’ailleurs évidents à qui veut bien ouvrir les yeux : citons le désintérêt complet de l’opinion publique pour l’actuel « synode sur la synodalité » – dont les diffusions en streaming sontboudées par des milliards de catholiques – ou le flop de Laudate Deum, pourtant censé réveiller les consciences de l’humanité tout entière. À quoi bon aller chercher chez le pape un discours que l’on trouve déjà, souvent servi de façon plus convaincante, chez les politiciens ?
Mais pourquoi ce document est-il si gênant ?
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